May 31, 2024

Du graphène dans nos batteries

 


Organisation en “nid “d’abeille” des atomes de carbone dans le graphène

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/10/Graphene.svg


La production et consommation d’énergie est de nos jours aux cœurs des débats, en lien avec des problématiques aussi bien économiques qu’environnementales, à toutes les échelles. C’est ainsi que nous avons assisté à l’essor des batteries électriques, qui sont désormais présentes dans la majorité de nos objets du quotidien à travers les nouvelles technologies, de nos appareils ménagers jusque dans nos voitures. 


Les batteries lithium-ion notamment sont très répandues sur le marché des appareils électroniques de par leurs nombreuses qualités ; c’est à ce type de batteries que nous nous intéresserons ici. Plusieurs matériaux peuvent être utilisés dans les anodes et cathodes, mais leur fonctionnement général reste identique : une réaction d'oxydoréduction entre le lithium et un autre solide permet un transfert d’ions Li+ et d’électrons, ce qui crée un courant électrique. Ces batteries sont légères et disposent d’une bonne autonomie ainsi que d’une charge rapide dues à la grande densité énergétique du lithium, soit la capacité à stocker beaucoup d’énergie dans un petit volume. 


Une amélioration constante des performances est toutefois recherchée et d'autres types de batteries, potentielles solutions à grande échelle, continuent d’émerger. C’est là qu'entrent en jeu les batteries au graphène. Encore en voie de développement, elles pourraient révolutionner l'efficacité de nos batteries. Mais alors, qu’est ce que le graphène ?


Le graphène est un nanomatériau bidimensionnel formé d’une unique couche d’atomes de carbone organisés en réseau hexagonal (nid d’abeille). Le carbone est allotropique : il se présente sous différentes structures cristallines à l’état solide. Ces formes, appelées allotropes, sont le graphite et le diamant notamment, mais aussi le graphène, qui possède donc une structure différente des deux matériaux précédents puisque uniquement bidimensionnelle. 



L'empilement du graphène donne le graphite : c’est la définition théorique donnée en 1947 par le physicien P. R. Wallace. Néanmoins, il fallut attendre jusqu’en 2004 pour isoler le graphène, soit séparer les couches d’atomes de carbone composant le graphite. Andre Geim et Konstantin Novoselov reçurent le prix Nobel en 2010 pour cette découverte. Les scientifiques étudient ce matériau depuis plusieurs années, et il se répand désormais lentement sur les marchés industriels grâce à ses propriétés intéressantes à exploiter. Le graphène serait en effet utile pour optimiser les performances des batteries, en augmentant par exemple leur cycle de vie grâce à son excellente conductivité à la fois électrique et thermique. 


Il est possible d’ajouter du graphène dans les anodes, cathodes, ou encore séparateurs afin d’obtenir de telles améliorations. De plus, le graphène est le matériau le plus fin connu de l’homme. Lorsqu'on en ajoute, le volume n’augmente que très peu, ce qui est idéal pour augmenter la densité énergétique. Son caractère hydrophobe peut aussi servir de couche de protection imperméable pour les batteries. Néanmoins, les composants des électrodes doivent respecter plusieurs conditions comme fonctionner sous une certaine tension pour permettre le mouvement des ions Li+ et conserver une structure stable après des centaines de cycles de charge. La sélection des matériaux est donc limitée. C’est pourquoi le graphène n’est pas étudié comme potentiel composant actif des batteries lithium-ion, mais comme matériau à incorporer dans les composants déjà présents, pour constituer ce qu’on appelle des composites en graphène. Cela permettrait d’utiliser des matériaux autrefois non adaptés aux batteries en changeant leurs propriétés, ou simplement d’améliorer les performances des batteries aux compositions déjà établies. Dans le cas de l’anode par exemple, utiliser du silicium permettrait en théorie une autonomie dix fois supérieure car il absorbe dix fois plus d’ions lithium que le graphite des anodes actuelles. Cependant, il quadruple de volume lors de la charge à cause de la dilatation thermique. La batterie ne tiendrait donc que quelques cycles avant que l’anode ne soit complètement fissurée par les dilatations et contractions répétées. Une des solutions trouvées serait d’utiliser une anode constituée de petites billes de silicium (100 nanomètres de diamètre) plutôt qu'un bloc solide. Seulement, le silicium étant un semi conducteur, il faut le recouvrir d’un matériau conducteur compatible avec les contraintes mécaniques de la dilatation. Là encore le graphène est tout trouvé : il est extrêmement résistant et sa très bonne conductivité thermique permet aussi de réduire le système de refroidissement, et par extension le volume total de la batterie, ce qui rend alors possible l’existence de batteries au silicium. 


Il existe plusieurs manières de synthétiser ces composites, mais elles présentent certains inconvénients. La méthode de dépôt chimique en phase vapeur permet d’obtenir un composite en graphène de grande qualité en incorporant une couche de graphène entre chaque couche de l’autre matériau. Mais non seulement coûteuse, cette méthode n’est pas adaptée ici car elle permet d’obtenir une structure en mille feuilles solide tandis que l’on utilise des poudres dans les batteries (plus petit volume). Une autre méthode consiste simplement à mélanger des fragments de graphène avec l’autre matériau. Son défaut principal est que la structure obtenue est très hétérogène, le composite n’est alors pas de grande qualité et ses performances ne sont donc pas vraiment optimisées. Malgré ses inconvénients, c’est cette technique qui semble la plus adaptée à grande échelle car elle est la moins coûteuse en permettant d’utiliser directement de la poudre de graphite, alors fragmentée en graphène pour procéder à la synthèse des composites.


Différentes méthodes de synthèse des composites en graphène à partir de graphite

https://www.mdpi.com/2311-5629/7/3/65


À l'heure actuelle, les batteries lithium-ion au graphène ont déjà fait leur preuve. En permettant notamment l’utilisation du silicium, les nouvelles générations de ces batterie ont atteint 972 W.h/L de densité énergétique lors du premier cycle, soit 1.8 fois plus élevée que celles actuellement commercialisées. 


En conclusion, les batteries au graphène pourraient révolutionner l’électronique en créant notamment des batteries plus performantes, impactant alors le quotidien de tous avec des appareils de meilleure autonomie par exemple. Certains produits au graphène sont déjà disponibles sur le marché, mais le coût des différentes méthodes de production des composites de graphène, ainsi que l’impossibilité actuelle d’obtenir un matériau de haute qualité à grande échelle restent des limites majeures pour ce nouveau type de batteries. 


Auteurs du blog : CHEVALLIER Coline, DERGHAL Sarah, TROUDE Thibault


Sources : 

https://lejournal.cnrs.fr/articles/le-graphene-superstar-episode-1

https://www.mdpi.com/2311-5629/7/3/65

https://www.carbon-waters.com/comment-differencier-les-differentes-formes-de-graphene/

https://www.nature.com/articles/ncomms8393

https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/graphene-graphene-ameliorer-batteries-lithium-ion-58920/



May 14, 2024

Solar Orbiter, une avancée technologique

 



Cet article est associé à un entretien avec Pierre Rochus Chercheur en Physique nucléaire et Ingénieur de recherches à FN Moteurs (TechSpace Aero SAFRAN actuellement). link


Le Solar Orbiter représente une avancée technologique extraordinaire dans le domaine de l'astronomie solaire, ayant un impact significatif sur notre compréhension du Soleil et de son influence sur notre système solaire. Lancé en 2020 par l'Agence spatiale européenne (ESA) en collaboration avec la NASA, le Solar Orbiter est une sonde spatiale équipée d'instruments de pointe conçus pour observer le Soleil à une proximité exceptionnelle. Cette incroyable innovation a permis d'acquérir des données inédites sur la couronne solaire, les vents solaires, les éruptions solaires ainsi que le champ magnétique héliosphérique. Les images et les informations collectées par le Solar Orbiter ont ouvert de nouvelles perspectives dans la compréhension des processus complexes qui régissent notre étoile, contribuant ainsi à des avancées majeures dans la modélisation des prévisions météorologiques spatiales et des impacts solaires sur les communications et les technologies terrestres. En révolutionnant notre capacité à étudier le Soleil de près, le Solar Orbiter a profondément transformé notre vision de l'astre solaire et a élargi les frontières de la recherche spatiale.


Dans un premier temps, nous nous intéresserons à l'étude des vents solaires, un phénomène d'une importance cruciale pour notre compréhension du système solaire. Grâce à ses instruments sophistiqués, le Solar Orbiter a la capacité de mesurer directement la vitesse, la composition et les propriétés des vents solaires à une proximité sans précédent du Soleil. Cette capacité inédite offre une perspective inégalée sur les mécanismes de génération et de propagation des vents solaires, fournissant des données essentielles pour élucider les processus complexes à l'origine de ces flux de particules chargées. Comprendre les vents solaires revêt une importance majeure dans la prédiction des conditions météorologiques spatiales, car ces vents peuvent influencer les champs magnétiques planétaires, les communications et les technologies terrestres. Ainsi, le Solar Orbiter élargit nos connaissances sur les vents solaires, contribuant à une meilleure anticipation des phénomènes spatiaux et renforçant notre capacité à gérer les impacts potentiels sur la Terre et les satellites en 

orbite.


Or, vous vous demandez sûrement qu’est ce qu’un vent solaire ? Comment ce phénomène nous permet-il de prédire les conditions météorologiques spatiales ? En quoi l’étude de ce phénomène renforce notre capacité à gérer les impacts potentiels sur la terre ? 


En effet, les vents solaires constituent un phénomène fascinant et crucial dans notre système solaire, résultant de l'éjection constante de particules chargées provenant de la couronne solaire, la couche extérieure de l'atmosphère du Soleil. Composés principalement de protons et d'électrons, ces particules, une fois libérées, se propagent à des vitesses extrêmement élevées, atteignant parfois plusieurs centaines de kilomètres par seconde. Le mécanisme à l'origine de ce phénomène implique des processus complexes de chauffage et d'accélération dans la couronne solaire, générant un flux continu de plasma solaire. Les vents solaires interagissent de manière significative avec les champs magnétiques des planètes du système solaire, modifiant leurs environnements magnétiques et atmosphériques. Ces interactions ont des implications importantes, allant de l'influence sur les aurores à la modulation des atmosphères planétaires. De plus, les vents solaires jouent un rôle crucial dans la création de la queue des comètes, formée lorsque les particules solaires interagissent avec les gaz et les poussières des noyaux cométaires. Comprendre les vents solaires revêt une importance fondamentale pour la recherche spatiale et la compréhension des conditions de l'espace interplanétaire.


 À quoi pourraient donc servir ces vents solaires ?


 Ensemble, elles forment l'héliosphère, une région de l’espace qui peut être représentée comme une sorte de bulle de protection autour du système solaire, avec le soleil en son centre, et ayant un diamètre plusieurs fois plus grand que celui de notre système solaire. Cette région est où l'influence du vent solaire s'arrête, car il entre en collision avec d'autres particules de l'environnement interstellaire et les rayons cosmiques de haute énergie. Ce milieu interstellaire est composé de matière qui remplit l'espace entre les étoiles, notamment de l'hydrogène ionisé ainsi que atomique et moléculaire mais aussi de l'hélium, ainsi que de grains dont la taille varie de la centaine de nanomètres jusqu'au micron.


Sa dynamique n'est alors plus suffisante pour repousser l'hydrogène et l'hélium raréfiés de la Galaxie. Le choc de terminaison est une limite intermédiaire située près de l'héliosphère. L'héliosphère n'est pas statique et varie constamment en raison des variations dans l'activité solaire, des mouvements des planètes et de l'interaction avec le milieu interstellaire. Tout comme la Terre se protège contre les vents solaires néfastes pour elle et son atmosphère, le Soleil est pourvu de l'héliosphère qui le protège contre les rayons interstellaires à haute énergie et les particules de l'environnement interstellaire. Cela forme une première barrière limitant l'érosion de l'atmosphère terrestre, ce qui ferait que la Terre ressemblerait davantage à une planète dépourvue de magnétosphère, comme Vénus ou Mars, si elle n'était pas protégée par cette héliosphère. L'analyse de l'héliosphère est de grande importance afin de comprendre notre environnement spatial et les enjeux pour des futures missions spatiales. Hors de l'héliosphère comme la mission Voyager 1 et 2. 


Intéressons-nous plus à la mission Solar Orbiter, un projet  financé et géré par l’ESA ainsi que la NASA.  Solar Orbiter est un satellite opérationnel qui a pour objectif de réaliser une étude à haute résolution du Soleil et de son héliosphère. Il a été conçu pour résister aux températures extrêmes tout en ayant à son bord des télescopes performants. Cette mission a donc pour objectif de mieux comprendre le comportement imprévisible de l’étoile sur laquelle notre vie dépend. A son point de trajectoire le plus proche du Soleil, le satellite sera sur l’orbite de Mercure ce qui permettra d’avoir de nouvelles données jusqu’alors impossible à obtenir car cette distance entre un satellite et le soleil n’avait jamais été aussi faible. Solar orbiter est donc le premier satellite qui permettra d’avoir une vue sur les régions polaires du soleil, qui sont invisibles ou presque depuis la Terre. Le satellite permettra également d’assister à des tempêtes solaires pendant une plus longue durée que depuis la Terre.

On se demande alors ce qu'apporte cette mission de nouveau aux recherches ? Qu’est-ce qui fait de cette invention un exploit pour le monde de la recherche ?  

Solar Orbiter est 4 fois plus proche du Soleil que nous le sommes et sera donc exposé à 13 fois plus de radiations solaires que nous. Le satellite devra aussi subir des chocs dus aux émissions de particules atomiques émises par les explosions au sein de l’atmosphère solaire. 


Afin de résister à ces différents obstacles Solar orbiter est équipé de nouvelles technologies développées par l’ESA pour la mission BepiColombo telles que des panneaux solaires et antennes résistants aux hautes températures. Les clichés pris par Solar Orbiter permettent de distinguer des détails de 180km de long en sachant que la taille du soleil est de 1,4 million de kilomètres de large. Enfin, Solar Orbiter étant en orbite autour du soleil, il pourra observer la construction des tempêtes solaires puis leurs déroulements pendant plusieurs jours. On peut également s’intéresser au long voyage de ce satellite , celui-ci a décollé en février 2020 et a ensuite voyagé pendant 2 ans avant de trouver son orbite de 180 jours autour du soleil. Pendant ces 2 ans, le vaisseau utilisait la gravité de la Terre et de Vénus pour se stabiliser. 

Sur cette orbite, le satellite atteindra son point le plus proche du soleil tous les 6 mois à 42 millions de kilomètres de celui- ci. Durant sa mission la gravité de Vénus sera utilisée de nouveau afin de régler l’inclinaison du satellite ce qui permettra aux instruments d’observer les régions polaires du soleil à plus de 30 degrés comparé à 7 degrés depuis la Terre. 


En conclusion, le Solar Orbiter représente un exploit remarquable dans le domaine de l'exploration spatiale, ouvrant de nouvelles perspectives sur notre compréhension du Soleil et de son influence sur notre système solaire. Cette invention révolutionnaire a transcendé les frontières de la connaissance, apportant des avancées significatives qui ont profondément impacté notre vision du monde. En scrutant les mystères du Soleil de manière inédite, le Solar Orbiter a contribué à redéfinir notre relation avec l'univers, marquant ainsi une étape majeure dans l'histoire de l'exploration spatiale et laissant un héritage durable pour les générations futures.


Blog écrit par: Leila Lazzem , Wilson Woodhead , Prima Barciet 


Sources: 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Solar_Orbiter

https://www.esa.int/Space_in_Member_States/France/Les_premieres_images_de_Solar_Orbiter_devoilent_des_feux_de_camp_sur_le_Soleil

https://fr.wikipedia.org/wiki/Vent_solaire

https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9liosph%C3%A8re

​​https://www.futura-sciences.com/sciences/definitions/univers-heliosphere-3628/

https://science.nasa.gov/heliophysics/focus-areas/heliosphere/